Archive dans 17 mai 2019

Le PLUi de la CAB – Les conséquences du jugement d’annulation partielle du 21 janvier 2019

Afin de répondre aux questions de nos clients propriétaires, et anticiper celles qui pourraient se faire jour, nous avons jugé opportun d’écrire cet article destiné à expliquer les conséquences de la décision du Tribunal Administratif de Lille du 21 janvier 2019 au sujet du PLUi de la Communauté d’Agglomération du Boulonnais (CAB).

Cette décision, que nous avons pu consulter, fait suite à une requête en annulation de la délibération du 6 avril 2017 par laquelle la CAB avait approuvé son plan local d’urbanisme intercommunal de la part du GDEAM (Groupement pour la défense de l’environnement de l’arrondissement de Montreuil-sur-mer et du Pas-de-Calais).

Le Tribunal Administratif ne retient de cette demande que l’annulation de la délibération approuvant le PLUi de la CAB, uniquement « en tant qu’elle classe » certains espaces des communes de Saint-Etienne-au-Mont, Neufchatel-Hardelot, Wimereux, Wimille et Dannes, dans des zonages urbains (UCb-II, UEt, UGa, UGb, UCd-I, UEb, UFc) qu’il juge donc illégaux.

La CAB n’a pas souhaité faire appel de ce jugement qui est donc devenu définitif en mars dernier.

Il apparaît donc probable que les documents du PLUi soient prochainement mis en concordance avec ce jugement.

L’on peut donc se demander ce qu’il advient provisoirement des règles opposables dans ces secteurs (14 au total) pour les propriétaires concernés, sachant qu’ils n’ont pas été joints à la cause.

Outre le fait qu’ils disposent de la faculté de recourir, par la procédure dite de « tierce opposition », sur la base de l‘article R832-1 du Code de Justice Administrative, contre cette décision, la question se pose, en effet, de savoir quelle règle est devenue applicable dans ces zones depuis le 21 janvier 2019, dans l’attente de la mise à jour du PLUi.

Il n’y a pas de doute sur l’impossibilité de continuer à appliquer la règle du PLUi puisqu’on la sait désormais illégale (principe de l’arrêt Ponard de novembre 1958).

L’on peut affirmer que, pour ce qui concerne l’instruction des autorisations d’urbanisme, il convient de s’en remettre provisoirement aux règles du document antérieur, ainsi que le prévoit l’article L600-12 du code de l’urbanisme, dans l’attente de la mise à jour effective du PLUi, dans le sens du jugement prononcé.

L’on peut aussi anticiper sur un retour à court terme  des secteurs concernés en zone A (agricole) ou N (naturelle).

 

Un promoteur/lotisseur peut-il m’empêcher d’aménager mon terrain en extension de son opération ?

Lorsqu’une zone à aménager d’un PLU englobe plusieurs propriétés, l’aménageur qui aura initié une première tranche du projet sur l’une ou plusieurs d’entre elles, sera souvent tenté de prendre en otage les autres propriétaires, surtout s’ils ont refusé de céder leur part de terrain au prix que ce dernier aurait jugé acceptable !

Qu’en est-il donc de ces pratiques qui consistent, pour l’aménageur, à conserver, par devers lui, une bande de terrain, dans le but de provoquer artificiellement l’enclavement des autres propriétés aménageables ?

Nous verrons que, dans la plupart des cas, il s’agit juridiquement d’une solution inefficace. Puis, nous étudierons dans quelle mesure, parce que les propriétaires voisins auront été mis en situation  de co-construire le projet urbain, il peut être envisagé que l’aménageur soit dédommagé d’une part des investissements réalisés, pour avoir eu le mérite de prendre le risque des études et travaux sur une opération d’ensemble.

Examinons donc tout d’abord, le cas où l’aménageur a réalisé une première tranche de travaux en conservant une bande d’un mètre de large de terrain en bout de voirie.

L’erreur la plus souvent commise par l’aménageur est de ne pas prendre le soin d’exclure de son périmètre loti l’emprise de terrain qu’il souhaite conserver ! En effet, sans cette précaution, ladite emprise fait partie du projet urbain. Non seulement, son aménagement doit être décrit dans le programme des travaux, mais plus encore, son assiette fait partie des espaces communs qui sont à rétrocéder, soit à la commune, soit à l’association syndicale, si c’est le choix retenu. Dès lors, l’une ou l’autre ont un droit de regard sur le devenir de cet espace, y compris sur sa valorisation, sauf précaution apportée à ce sujet dans le cahier des charges…

En réalité, même avec cette précaution, il sera difficile à l’aménageur d’empêcher le désenclavement des terrains voisins.

  1. D’abord, les orientations d’aménagement de la zone imposent sûrement un schéma de desserte par des voies de circulation, de sorte que la puissance publique rendra nécessaire l’entente entre les parties : à défaut, la collectivité pourra toujours instituer un emplacement réservé « création de voie » sur les emprises privées qui viendraient contrevenir à l’intérêt général.
  2. L’aménageur aurait tort de sous-estimer les effets de l’article 682 du code civil qui veut qu’un propriétaire qui serait privé d’un accès à la voie publique puisse être désenclavé afin de pouvoir jouir pleinement des possibilités d’exploitation de son bien, moyennant une « indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner ».

L’on constate donc que les chances pour un aménageur de tirer un fruit de son investissement à l’égard de propriétaires riverains sont assez réduites !

Pour autant, nous estimons qu’elles ne sont pas toujours nulles !

En effet, si l’on imagine qu’un aménageur proposait à un propriétaire riverain de partager le coût de mise en viabilité d’une voie qu’il installerait « à cheval » entre leurs propriétés respectives pour respecter le principe de desserte des OAP (orientations d’aménagement et de programmation), mais que ce dernier refusait explicitement cette proposition, obligeant l’aménageur à créer la voie exclusivement et à ses seuls frais sur sa propriété, l’on pourrait objectivement en déduire que le propriétaire voisin s’est lui-même enclavé !

Nous ignorons si le Juge de l’ordre judiciaire lui refuserait le désenclavement par la voie nouvelle ainsi réalisée, mais il est probable qu’il lui infligerait de devoir supporter le remboursement du coût d’une partie des ouvrages, à titre d’indemnité « proportionnée au dommage occasionné », si celui-ci venait à faire jouer, avec la plus grande mauvaise foi, l’article 682 du code civil.

Nous laissons aux Avocats et juristes spécialisés le soin de commenter notre analyse.