Transférer du CES pour augmenter l’emprise au sol d’un terrain à bâtir – est-ce possible ?

Depuis que la Loi ALUR du 24 mars 2014 a mis fin aux COS et aux superficies minimales dans les PLU et PLU intercommunaux, la densité urbaine est gérée exclusivement par le coefficient d’emprise au sol et les hauteurs de construction, généralement fixés respectivement aux articles 9 et 10 des règlements d’urbanisme.

L’emprise au sol est définie à l’article R420-1 du code de l’urbanisme :

« L’emprise au sol au sens du présent livre est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus.
Toutefois, les ornements tels que les éléments de modénature et les marquises sont exclus, ainsi que les débords de toiture lorsqu’ils ne sont pas soutenus par des poteaux ou des encorbellements. »
Ainsi le coefficient d’emprise au sol constitue le rapport entre la somme des emprises au sol couvertes par les constructions et bâtiments d’un terrain, et la superficie du terrain pris pour référence.

En urbanisme, la notion de « transfert » de densité, propre à la gestion du COS, parfois mentionné à l’article 14 des anciens POS, mais encadré par l’article L123-4 et dont l’objectif était de basculer du COS d’une zone émettrice vers une zone réceptrice, n’existe plus depuis le 23 septembre 2015.

Pour rappel, cette disposition s’accompagnait d’une servitude administrative à constater dans un acte authentique, qui grevait alors le terrain « émetteur » de densité :

« […] En cas de transfert, la totalité du terrain dont les possibilités de construction sont transférées est frappée de plein droit d’une servitude administrative d’interdiction de construire constatée par un acte authentique publié au fichier immobilier. Cette servitude ne peut être levée que par décret pris sur avis conforme du Conseil d’Etat. »

Le législateur n’a pas prévu de dispositif similaire pour envisager le « transfert » d’emprise au sol.

Pour autant, de la même façon que se posait la question de la répartition de SHON (devenue surface de plancher) à l’intérieur d’un périmètre loti en vertu d’un COS (coefficient d’occupation du sol) applicable à une zone donnée, l’on peut se poser la question de la répartition de l’emprise au sol à l’intérieur d’une opération de lotissement.

En particulier, si le règlement du plan local d’urbanisme ne s’oppose pas explicitement à l’application du R151-21 (mieux connu sous l’ancien numéro  R123-10-1), qui dispose :

« […]

Dans le cas d’un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d’assiette doit faire l’objet d’une division en propriété ou en jouissance, l’ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d’urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s’y oppose. »

alors, l’on pourra parfaitement imaginer une répartition de l’emprise au sol au travers des différents lots, bien que le législateur n’ait pas pris la peine de le prévoir explicitement dans les pièces de la déclaration préalable de division, ou dans celles du permis d’aménager.

Dès lors, le lotisseur devra garantir à l’administration une emprise au sol maximale affectée aux lots issus de son opération de lotissement pour en assurer la conformité, mais il pourra limiter contractuellement celle d’un lot au bénéfice d’un autre.

A noter qu’en l’espèce, les limitations au droit de construire n’auront pas eu à faire l’objet d’une servitude administrative constatée par acte authentique, puisque non encadrées par le législateur.

Publié le 4 mai 2018 par

Garantie du retour favorable du permis de construire

Peut-on objectivement garantir le retour favorable à une demande de permis de construire dans le délai légal ?

Les ventes de terrain à bâtir se signent, dans leur grande majorité, sous condition suspensive d’obtention du permis de construire par les acquéreurs, avec, souvent, une reconduction tacite du compromis au-delà de l’échéance prévue initialement.

Cette pratique, qui a pu apparaître contraignante par le passé, emporte aujourd’hui l’adhésion d’une grande majorité de Notaires, tant il y eût de cas où un terrain, réputé constructible, ne pût recevoir la moindre construction ! (cf « Est-il toujours possible de construire sur un terrain réputé constructible ?« )

De sorte que si l’acquéreur d’un terrain à bâtir peine à obtenir le précieux sésame, le terrain des vendeurs peut se trouver immobilisé … indéfiniment.

Ainsi, il nous apparaît qu’au lieu de soumettre l’exécution du compromis au respect d’une date de dépôt, il conviendrait d’y fixer une date limite d’octroi du permis de construire.

Si l’acquéreur y rechignait, préférant lui, profiter des dispositions de reconduction tacite du compromis, il pourrait être proposé par le vendeur de prendre en charge le contrôle du dépôt de permis de construire, de manière à s’assurer par lui-même de la qualité des diligences de l’acquéreur. 

Mais, un prestataire compétent en urbanisme, fût-il Avocat spécialisé en droit de l’urbanisme, peut-il toujours, objectivement, faire la promesse d’un retour gagnant de toute demande d’occuper le sol, qu’il aurait pris soin d’examiner ? (Le cas du Permis de Construire une Maison Individuelle (PCMI), décrit ici, est extensible aux autres cas de permis de construire).

Toute demande de permis de construire est à établir avec l’assistance d’un Architecte DPLG dès lors que le projet de construction ou de rénovation de logement d’habitation dépasse les 150 m² de surface de plancher (depuis le 1er mars 2017).

En passant en revue une demande de permis avec 14 articles habituels d’un règlement d’urbanisme, il  devrait être possible de vérifier très rapidement s’il est susceptible d’être accepté dans les deux mois (délai abrégé réservé aux PCMI) de son dépôt.

Hélas,…

Tout d’abord, afin que le délai commence à courir, il faudra pouvoir donner « date certaine » au dépôt des pièces en Mairie du lieu du projet, de sorte que le délai commence à courir.

Il faudra ensuite, avoir vérifié, sur le plan formel, que la demande est bien complète (toutes les pièces fournies, suffisamment explicites et en nombre suffisant). A défaut, un nouveau délai sera fixé à compter du dépôt des pièces complémentaires . Il s’agit donc d’un premier écueil à surmonter !

Ce n’est pas le plus facile : certes, le nombre des pièces à produire et leur contenu sont fixés par le code de l’urbanisme, mais d’un service instructeur à l’autre, les exigences quant au contenu peuvent varier sensiblement !

Parallèlement, il sera nécessaire d’avoir consulté le certificat d’urbanisme d’information notamment en ce qui concerne les limitations au droit de construire (servitudes administratives)  : certaines d’entre elles peuvent entraîner la nécessité de produire des pièces complémentaires avec des délais complémentaires ! … d’autres peuvent même être de nature à empêcher jusqu’à la moindre construction !

Enfin, il faut savoir que le certificat peut avoir oublié de mentionner l’existence de servitudes existantes susceptibles de contrarier le projet envisagé. A noter qu’en de telles circonstances, l’erreur de l’administration ne saurait « profiter » au pétitionnaire.

Il devra tout de même rendre son projet conforme à la règle d’urbanisme, et ne bénéficiera, le cas échéant, que de la possibilité de faire indemniser un préjudice dont il devra prouver qu’il est certain et direct. Toutes ces vérifications ne peuvent donc être menées que par un professionnel du droit de l’urbanisme, comme un Avocat. Parfois, des Architectes ou des Géomètres-Experts auront pu développer des compétences particulières en la matière. Ils seront donc avantageusement sollicités, soit par les acquéreurs de terrain à bâtir, eux-mêmes pétitionnaires, soit encore par les vendeurs de terrain à bâtir.

Si l’on ajoute aux éléments ci-dessus le risque d’erreur du professionnel qui se proposerait d’accompagner un client pour obtenir son permis de construire dans le délai légal, il devient évident que l’aléa de se voir opposer un délai supplémentaire, voire un refus, persiste bel et bien !

Aussi, dans tous les cas, le client qui souhaitera missionner un professionnel pour assurer la relecture et la vérification que le permis qu’il dépose a toutes les chances d’aboutir, devra nécessairement exiger une garantie de résultat, sous peine de rémunérer un travail inefficace.

Le 23 février 2018 par Thierry Bléard Géomètre Expert

De l’intérêt de savoir obtenir une autorisation d’urbanisme sous 18 mois (L290-1 et L290-2 du CCH)

« De l’intérêt de savoir obtenir une autorisation d’urbanisme définitive sous 18 mois ! »

Pour un promoteur ou un aménageur, se faire autoriser administrativement un projet immobilier sous le délai de 18 mois est clairement avantageux … !

En effet, les articles L290-1 et L290-2 du code de la construction et de l’habitation (CCH) disposent que :

Toute promesse de vente ayant pour objet la cession d’un immeuble ou d’un droit réel immobilier, dont la validité est supérieure à dix-huit mois, ou toute prorogation d’une telle promesse portant sa durée totale à plus de dix-huit mois est nulle et de nul effet si elle n’est pas constatée par un acte authentique, lorsqu’elle est consentie par une personne physique.

La promesse unilatérale de vente mentionnée à l’article L. 290-1 prévoit, à peine de nullité, une indemnité d’immobilisation d’un montant minimal de 5 % du prix de vente, faisant l’objet d’un versement ou d’une caution déposés entre les mains du notaire.

Cela signifie qu’il est possible pour un promoteur ou aménageur de ne pas risquer de devoir payer 5% du prix de vente du terrain d’assiette, si ses prestataires de service (principalement Architecte et Géomètre-Expert) sont capables de lui fournir une autorisation d’urbanisme en moins de 18 mois !

De plus, accepter de relever un tel défi, c’est également se différencier d’offres concurrentes auprès du ou des propriétaires vendeurs, si ceux-ci n’entendent pas insérer la clause de la reconduction tacite du compromis, .. clause largement utilisée par certains promoteurs, en cas de retard, justifié ou non, pris dans l’obtention des autorisations administratives !

Il faut d’ailleurs anticiper le fait que, pour être parfaitement sécurisé, le promoteur et son Notaire aimeront à se prémunir contre le risque de recours des tiers, de retrait et de déféré préfectoral, à l’encontre de l’autorisation délivrée,… d’où l’exigence d’un octroi du permis sous 15 mois de la signature !

Dans un tel cas de figure, l’on perçoit bien la nécessité de fixer dans l’avant-contrat, non pas le délai de dépôt du permis, mais bien le délai d’obtention de celui-ci !

… une bien belle façon de sonder à la fois la qualité du conseil du Notaire, et, à la fois, l’intention des promoteurs ou aménageurs à réaliser la vente dans les conditions de la promesse de vente !

A ce sujet, la SCP BLEARD-LECOCQ propose une mission d’accompagnement des projets immobiliers, pour éviter les avant-contrats de longue durée, avec une garantie de résultat, pour un montant de l’ordre de 1% HT du prix de vente du terrain.

Le 12/02/2018 par Thierry BLEARD, Géomètre-Expert à Boulogne sur Mer

Le PLUI de la CCT2C – Les conséquences de son illégalité

Le PLUI de la CCT2C – Les conséquences de son illégalité suite à la décision du Tribunal Administratif de Lille à l’encontre d’un permis de construire

Afin de répondre aux questions de nos clients propriétaires, et anticiper celles qui pourraient se faire jour dans les semaines à venir, nous avons jugé opportun d’écrire cet article destiné à expliquer les conséquences de la décision du Tribunal Administratif de Lille du 19 décembre 2017 au sujet du PLUI de la Communauté de Communes de la Terre des 2 Caps.

Il faut tout d’abord savoir que la décision en question, que nous avons pu consulter dans son intégralité, a été prise à l’encontre d’un permis de construire en vue de son annulation pour différents motifs, dont celui de l’illégalité du PLUI.

Le Tribunal a estimé, en effet, qu’en ayant subi des modifications, en l’occurrence de règles de hauteur, entre la date de sa soumission à l’enquête publique et celle de son approbation, alors que ces modifications ne procédaient pas de l’enquête – indépendamment de la question de savoir si l’économie générale du projet était remise en cause – le PLUI se trouvait « entaché d’illégalité dans son ensemble ».

Il s’agit de l’application  de l’article L153-21 du code de l’urbanisme.

C’est donc cette « simple » considération du Jugement rendu qui jette le trouble sur l’opposabilité du document d’urbanisme couvrant les 21 communes de la Terre des 2 Caps.

En effet, le Tribunal aurait pu tout aussi bien considérer illégale la modification des règles de hauteur, pour annuler le permis de construire, sans remettre en cause la légalité du PLUI dans son ensemble, d’autant que d’autres motifs d’annulation se révélaient suffisants dans le Jugement pour y procéder !

En jugeant ainsi, il statue au-delà même de la question qui lui était posée sur la stricte légalité du permis de construire qui avait été accordé, selon le mécanisme de « l’exception d’illégalité », prévue à l’article L600-1 du code de l’urbanisme, qui vise : « la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l’enquête publique », ..avec des conséquences graves, qu’il convient de bien évaluer !

Il est un principe, en droit administratif, datant d’un arrêt très ancien, repris et étendu depuis dans la jurisprudence Alitalia: dans CE. 14 novembre 1958, Sieur Ponard, Rec., p.554, dans lequel le Conseil d’Etat a érigé en principe général, le fait que l’administration a l’obligation de ne pas appliquer une norme réglementaire qu’elle sait illégale.

Dès lors, l’on peut affirmer facilement qu’il n’est nul besoin d’une correction du document d’urbanisme, pour que les règles de hauteurs dépassant celles issues de l’enquête publique n’aient plus à s’appliquer…

… mais qu’en est-il pour le PLUI « dans son ensemble » ?

Hélas, le principe de l’arrêt Ponard s’applique pleinement.

Il est d’ailleurs consacré à l’article L600-12 du code de l’urbanisme, qui, en outre, nous indique quelle règle appliquer suite à une déclaration d’illégalité :

« L’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d’urbanisme, le document d’urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. »

L’on comprend alors que la décision du Tribunal Administratif de Lille du 19 décembre 2017 n’est pas neutre sur l’application du droit des sols pour les 21 communes de la Terre des 2 Caps.

Elle génère, en particulier, une incertitude sur les autorisations accordées depuis, si elles l’ont été, et c’est probable, sur la base des règles du PLUI.

Nous recommandons, pour les titulaires d’autorisations d’occuper le sol, d’attendre le délai de purge des recours des tiers (2 mois), le délai de retrait (3 mois), mais aussi et surtout le délai de déféré préfectoral qui est de 2 mois à compter de la transmission de l’acte par l’autorité compétente au Préfet. Encore faudra-t-il s’assurer, pour ce dernier point, que la transmission se soit bien faite dans les 15 jours de la signature de l’acte comme le prévoit l’article L2131-1 du code général des collectivités territoriales, sous peine que le délai de déféré ne démarre que très tardivement,… parfois jamais !

Pour ceux qui travaillent actuellement sur des demandes d’autorisation d’occuper le sol (déclaration préalable, permis de construire, permis d’aménager, ..), nous conseillons de travailler sur la base du PLUI, puis repasser le projet au crible des règles du document antérieur.

En effet, la plupart du temps, la règle du PLUI sera plus contraignante.

Cela aura aussi l’avantage de sécuriser les autorisations d’urbanisme délivrées, dans le cas où la CCT2C viendrait à rectifier son document dans l’intervalle des instructions en cours.

Des cas plus difficiles pourront néanmoins se présenter lorsque la règle sera simplement différente entre les deux documents (règle de distance par rapport aux limites séparatives, ou à l’alignement, par exemple)

A noter, par ailleurs, que l’usage des certificats d’urbanisme, qui ont précisément pour objectif de geler les droits à construire pour une durée de 18 mois, se trouve fortement perturbé avant et pendant la période de déclaration d’illégalité d’un document d’urbanisme !

Ainsi, deux cas de figure peuvent se poser, à priori, pour les certificats d’urbanisme :

  • Un certificat d’urbanisme en cours de validité a été obtenu avant la déclaration d’illégalité du PLUI : le certificat, basé sur le PLUI, se trouve alors privé de base légale et perd donc ses effets. Il cristallise donc … la règle du document antérieur, en vertu du principe de l’arrêt Ponard, selon lequel l’administration a l’obligation de ne pas appliquer une norme réglementaire qu’elle sait illégale,
  • Un certificat d’urbanisme est déposé après la déclaration d’illégalité du PLUI :
    • Soit le certificat délivré tient compte du jugement d’illégalité du PLUI et cristallise la règle antérieure dans la forme et dans les faits,
    • Soit le certificat délivré se base sur le PLUI, et à nouveau, se trouvant privé de base légale, il cristallisera la règle antérieure, dans les faits !

On observe ainsi que, dans tous les cas, le certificat d’urbanisme en cours de validité n’aura jamais le pouvoir de faire « survivre ponctuellement » le PLUI, tant que celui-ci est réputé ne plus être en vigueur.

L’administré qui serait néanmoins invité formellement, par le biais d’un certificat d’urbanisme, à appliquer la règle du PLUI, et constatant par la suite que ce n’est pas le cas dans les faits (recours, retrait ou déféré), n’aurait comme seule consolation possible, qu’un recours indemnitaire pour avoir été mal informé.

Nous reviendrons vers vous dans un deuxième temps pour évoquer les évolutions prévisibles de la règle d’urbanisme applicable dans les communes de la CCT2C, selon la suite que la collectivité entendra donner à la situation que nous avons cherché à décrire.