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Garantie du retour favorable du permis de construire

Peut-on objectivement garantir le retour favorable à une demande de permis de construire dans le délai légal ?

Les ventes de terrain à bâtir se signent, dans leur grande majorité, sous condition suspensive d’obtention du permis de construire par les acquéreurs, avec, souvent, une reconduction tacite du compromis au-delà de l’échéance prévue initialement.

Cette pratique, qui a pu apparaître contraignante par le passé, emporte aujourd’hui l’adhésion d’une grande majorité de Notaires, tant il y eût de cas où un terrain, réputé constructible, ne pût recevoir la moindre construction ! (cf « Est-il toujours possible de construire sur un terrain réputé constructible ?« )

De sorte que si l’acquéreur d’un terrain à bâtir peine à obtenir le précieux sésame, le terrain des vendeurs peut se trouver immobilisé … indéfiniment.

Ainsi, il nous apparaît qu’au lieu de soumettre l’exécution du compromis au respect d’une date de dépôt, il conviendrait d’y fixer une date limite d’octroi du permis de construire.

Si l’acquéreur y rechignait, préférant lui, profiter des dispositions de reconduction tacite du compromis, il pourrait être proposé par le vendeur de prendre en charge le contrôle du dépôt de permis de construire, de manière à s’assurer par lui-même de la qualité des diligences de l’acquéreur. 

Mais, un prestataire compétent en urbanisme, fût-il Avocat spécialisé en droit de l’urbanisme, peut-il toujours, objectivement, faire la promesse d’un retour gagnant de toute demande d’occuper le sol, qu’il aurait pris soin d’examiner ? (Le cas du Permis de Construire une Maison Individuelle (PCMI), décrit ici, est extensible aux autres cas de permis de construire).

Toute demande de permis de construire est à établir avec l’assistance d’un Architecte DPLG dès lors que le projet de construction ou de rénovation de logement d’habitation dépasse les 150 m² de surface de plancher (depuis le 1er mars 2017).

En passant en revue une demande de permis avec 14 articles habituels d’un règlement d’urbanisme, il  devrait être possible de vérifier très rapidement s’il est susceptible d’être accepté dans les deux mois (délai abrégé réservé aux PCMI) de son dépôt.

Hélas,…

Tout d’abord, afin que le délai commence à courir, il faudra pouvoir donner « date certaine » au dépôt des pièces en Mairie du lieu du projet, de sorte que le délai commence à courir.

Il faudra ensuite, avoir vérifié, sur le plan formel, que la demande est bien complète (toutes les pièces fournies, suffisamment explicites et en nombre suffisant). A défaut, un nouveau délai sera fixé à compter du dépôt des pièces complémentaires . Il s’agit donc d’un premier écueil à surmonter !

Ce n’est pas le plus facile : certes, le nombre des pièces à produire et leur contenu sont fixés par le code de l’urbanisme, mais d’un service instructeur à l’autre, les exigences quant au contenu peuvent varier sensiblement !

Parallèlement, il sera nécessaire d’avoir consulté le certificat d’urbanisme d’information notamment en ce qui concerne les limitations au droit de construire (servitudes administratives)  : certaines d’entre elles peuvent entraîner la nécessité de produire des pièces complémentaires avec des délais complémentaires ! … d’autres peuvent même être de nature à empêcher jusqu’à la moindre construction !

Enfin, il faut savoir que le certificat peut avoir oublié de mentionner l’existence de servitudes existantes susceptibles de contrarier le projet envisagé. A noter qu’en de telles circonstances, l’erreur de l’administration ne saurait « profiter » au pétitionnaire.

Il devra tout de même rendre son projet conforme à la règle d’urbanisme, et ne bénéficiera, le cas échéant, que de la possibilité de faire indemniser un préjudice dont il devra prouver qu’il est certain et direct. Toutes ces vérifications ne peuvent donc être menées que par un professionnel du droit de l’urbanisme, comme un Avocat. Parfois, des Architectes ou des Géomètres-Experts auront pu développer des compétences particulières en la matière. Ils seront donc avantageusement sollicités, soit par les acquéreurs de terrain à bâtir, eux-mêmes pétitionnaires, soit encore par les vendeurs de terrain à bâtir.

Si l’on ajoute aux éléments ci-dessus le risque d’erreur du professionnel qui se proposerait d’accompagner un client pour obtenir son permis de construire dans le délai légal, il devient évident que l’aléa de se voir opposer un délai supplémentaire, voire un refus, persiste bel et bien !

Aussi, dans tous les cas, le client qui souhaitera missionner un professionnel pour assurer la relecture et la vérification que le permis qu’il dépose a toutes les chances d’aboutir, devra nécessairement exiger une garantie de résultat, sous peine de rémunérer un travail inefficace.

Le 23 février 2018 par Thierry Bléard Géomètre Expert

Est-il toujours possible de construire sur un terrain « réputé » constructible ?

Est-il toujours possible de construire sur un terrain « réputé » constructible ?

Lors d’une vente de terrain à bâtir, le Notaire prévoit, sauf exception, d’insérer une clause suspensive d’obtention du permis de construire, et, à minima, purgé des recours de tiers. Dans cet article, nous allons nous intéresser aux raisons d’une telle précaution. 

1. D’abord, qu’est-ce qu’un terrain « réputé » constructible ?

Pour comprendre l’intérêt de la question posée, il faut tout d’abord se figurer que la notion de « terrain à bâtir » n’existe qu’en droit fiscal. En effet, le législateur, au fil des ans et des décennies, a trouvé dans le terrain à bâtir, un support de fiscalité très intéressant, et, d’autant plus intéressant, à mesure qu’il est devenu nécessaire de freiner la consommation des espaces agricoles (années 2000 avec la Loi SRU) pour construire, et donc à mesure que la matière « gisement à bâtir » devenue épuisable, a pris de la valeur !

Ainsi, l’on trouve sur internet, par exemple, cette définition du terrain à bâtir dans le lexique de Me Bruno Bédaride, Notaire à Paris :

« Immeuble placé dans une zone urbaine ou à urbaniser en vertu des documents d’urbanisme autorisant tout projet de construction en conformité avec les règles d’urbanisme applicables à cet immeuble. Les acquisitions de terrains à bâtir sont assujetties à la TVA immobilière sauf pour celles consenties à des personnes physiques* non assujetties à la TVA. »

En revanche, l’on ne trouvera aucune définition du « terrain à bâtir » dans le droit de l’urbanisme. L’on considérera donc que le terrain « réputé » constructible est un terrain pour lequel la règle d’urbanisme auquel il est assujetti, n’interdit pas la construction.

A noter ensuite, qu’en utilisant la formule « terrain constructible », l’on commet une première approximation puisqu’il faut distinguer la « construction » du « bâtiment » (le bâtiment doit pouvoir servir d’abri, ce que l’on n’exige pas d’une « construction »). Or, il est des zones géographiques où il est interdit d’édifier des bâtiments alors qu’il est parfaitement possible d’y installer des certaines constructions (ne serait-ce qu’une clôture, par exemple !)

A noter enfin que, par manque de rigueur, l’on assimile facilement la notion de terrain à bâtir, à la possibilité d’édifier des bâtiments à usage exclusif d’habitation, de sorte que l’on ne parlera que rarement de « terrain à bâtir » en zone agricole ou en zone naturelle, alors qu’il est, sous certaines conditions, parfaitement envisageable d’y édifier des bâtiments !

2. Quels peuvent être les freins à la construction sur un terrain « réputé » constructible ?

Pour l’intérêt de l’article, nous considérerons donc ici le terme « constructibilité », dans le sens particulier de « possibilité d’édifier un bâtiment ».

Nous n’avons pas la prétention de faire ici une analyse exhaustive des cas de terrains à bâtir « réputés » constructibles sur lesquels il ne sera finalement pas possible d’utiliser la totalité des droits à bâtir, mais simplement démontrer que la « constructibilité » au regard du droit de l’urbanisme « n’emporte » pas systématiquement la possibilité d’édifier une construction.

Les freins aux projets immobiliers peuvent provenir à la fois de règles émanant de l’ordre judiciaire (droit civil), mais aussi d’autres règles émanant de l’ordre administratif, qui viendraient contredire la règle d’urbanisme, elle-même étant pourtant déjà une contrainte de droit public.

Voici deux exemples dans lesquels le respect du droit de la propriété (régi par le code civil) peut constituer un premier frein à un projet immobilier :

  • Un terrain peut parfaitement être situé en zone urbaine, et donc réputé constructible, sans que les droits à construire puissent être utilisés par le pétitionnaire, parce qu’il doit souffrir une servitude conventionnelle « non-aedificandi », par exemple,

  • Un terrain peut également être situé en zone urbaine, donc réputé constructible mais le cahier des charges du lotissement a défini des règles de limitation de la constructibilité, ou de limitation des divisions en vue de construire…

Dans le droit public, le respect du code du patrimoine peut constituer un autre frein à un projet immobilier :

  • La construction peut être empêchée par une hypothèque archéologique. En particulier, si l’on considère le cas dans lequel les fouilles prescrites par la préfecture mobilisent un budget mettant en péril économique le projet immobilier envisagé,

  • L’Architecte des Bâtiments de France peut également s’opposer au projet envisagé. Certes, cet avis devra être motivé au regard des prérogatives dont il dispose. Pour autant, dans les faits, un projet immobilier dans une zone où l’Architecte des Bâtiments de France doit rendre un avis « conforme » peut se trouver fortement remis en cause !

Le respect du code de l’environnement peut aussi constituer un frein sérieux à la construction. En effet, des mesures de protection de l’environnement (zone humide, zone Natura 2000, zone soumise à arrêté de protection de biotope,…) pourront empêcher un projet immobilier, ou bien le soumettre à des mesures compensatoires, après avoir mesuré son impact environnemental.

Le code de l’énergie peut également constituer un frein à la construction lorsqu’une canalisation de transport d’énergie traverse, sous couvert d’utilité publique, une propriété, fût-elle située en zone urbaine !…

3. Quels impacts de ces différents cas sur l’octroi d’un permis de construire ?

Pour que la condition d’obtention du permis de construire, prévue au stade du compromis, ait toute sa raison d’être, encore faut-il que ces différents freins à la construction de figure puissent être détectés au stade du permis de construire !

Est-ce le cas systématiquement ?

L’on distinguera à nouveau les freins liés à l’ordre judiciaire, de ceux liés à l’ordre administratif.

Ainsi, en matière civile, le législateur a organisé la possibilité, pour tout tiers y ayant intérêt, à agir en Justice contre la mise en oeuvre d’un permis de construire qui méconnaîtrait ses droits d’ordre privé. 

C’est heureux, car selon le principe de la séparation des deux ordres, il est impossible pour l’autorité compétente, quand bien même elle aurait connaissance d’éléments s’opposant à la mise en oeuvre de l’autorisation délivrée, de motiver un refus de construire sur la base de motifs de droit privé.

L’on dit qu’elle délivre les autorisations « sous réserve du droit des tiers »…

En matière de droit public, dans la plupart des cas, le droit pour un pétitionnaire de se voir apporter une réponse cohérente de l’administration, en tant qu’administré, a conduit le législateur à créer les passerelles nécessaires entre les différentes réglementations.

Ainsi, le certificat d’urbanisme se devra de mentionner toutes les servitudes administratives qui grèvent le terrain, objet de la demande.

Lors de l’instruction, les pièces du permis de construire seront alors transmises au personnes morales de droit public susceptibles d’être concernées par le projet immobilier.

Dans certains cas, le législateur aura d’ailleurs prévu des délais d’instruction complémentaires pour permettre au service sollicité de faire valoir son avis et prescriptions. C’est le cas à l’égard des contraintes immobilières issues du code du patrimoine, ou liées à des contraintes de passage de réseaux publics dans ou à proximité du terrain objet du projet.

En matière environnementale, il existe un parallélisme des procédures qui nuit parfois à la clarté pour le pétitionnaire. En effet, il conviendra souvent de déposer des dossiers d’étude auprès d’autres services, dans le cadre de procédures complémentaires. Les instructions devront alors se superposer et seul le service instruisant le permis de construire se souciera parfois de l’issue favorable des autres instructions, sous peine de refuser le permis de construire,…

Dans d’autres cas, ce sera au pétitionnaire de savoir qu’il ne doit pas mettre en oeuvre son permis de construire sans avoir réuni l’ensemble des autorisations complémentaires nécessaires.

En conclusion, le fait d’avoir obtenu un permis de construire purgé du recours des tiers et devenu « définitif » administrativement limite très fortement le risque d’inconstructibilité d’un terrain « réputé » constructible. Pour autant, d’autres difficultés d’ordre économique peuvent survenir lorsque, par exemple, la qualité du sous-sol impacte fortement le coût des fondations.

Ainsi, il sera toujours utile d’être accompagné de professionnels locaux.

Le 22 février 2018, par Thierry Bléard Géomètre Expert