Catégorie dans Immobilier

Deux bonnes raisons de ne pas oublier de déposer une « DAACT division » et quand la déposer ?

DAACT

En matière de lotissement, la DAACT (Déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux) sanctionne, comme son nom l’indique, l’achèvement et la conformité des travaux à l’autorisation d’urbanisme délivrée, que ces travaux aient été listés dans le programme des travaux d’un permis d’aménager, ou que ceux-ci aient fait l’objet d’une prescription lors de la délivrance de l’arrêté (R462-1 du C. Urb).

Lorsque les lots sont déjà desservis (même s’ils ne sont pas « raccordés » ou « branchés » aux réseaux), que l’on soit en permis d’aménager ou sous le régime de la simple déclaration préalable, se pose donc la question de l’utilité de déposer une DAACT.

Quelle conformité la DAACT peut bien « sanctionner » en l’absence de travaux ?

Il n’en va pas de même selon que l’on se trouve dans le cadre d’un permis d’aménager (PA) ou dans celui d’une non opposition à déclaration préalable de division (DP).

En matière de déclaration préalable de division, la doctrine considère que c’est la conformité au projet de division qui doit être contrôlée.

Cela a pour conséquence qu’on ne pourra déposer une DAACT – que l’on nommera ici « DAACT division » – qu’après la signature de l’acte authentique, date à laquelle la mutation intervient définitivement entre vendeur et acquéreur.

Attention, car la durée de validité d’une non opposition à déclaration préalable est de 3 ans. Il convient donc d’être vigilant sur la mise en oeuvre des divisions de l’opération de lotissement pendant ce délai !

C’est ainsi, par exemple, que la division d’une unité foncière en 3 lots de terrains à bâtir A, B et C pourra faire l’objet d’une « DAACT division » dès la vente du lot B (celui du milieu), alors que si le premier lot vendu est le lot A, la « DAACT division » de l’opération ne pourra valider la conformité de sa mise en oeuvre que lors de la vente d’un deuxième lot (B ou C). En attendant cette deuxième vente, seule une « DAACT division » partielle pourra être déposée pour valider la seule conformité à la division de A, car les lots B et C ne formeront qu’une seule et même unité foncière tant que l’un ou l’autre n’aura pas muté vers un propriétaire tiers !

Pour qui et pourquoi déposer cette « DAACT division », puisque la vente est déjà intervenue ?

Il se trouve que l’absence de contestation (sous 3 mois) d’une « DAACT division » n’est pas neutre juridiquement à l’égard de l’application des articles L442-14 et R600-3 du code de l’urbanisme !

Pour rappel, l’article L442-14 est celui qui interdit à l’administration de refuser un permis de construire sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles pendant un délai de 5 ans qui court à compter de l’arrêté de non opposition. Dès lors, le dépôt d’une « DAACT division » est clairement transparent à l’égard de cette disposition.

Pour autant, en l’absence de conformité régulièrement acquise (cad non contestée), l’on pourrait imaginer qu’un requérant se saisisse du moindre écart de conformité entre la division mise en oeuvre et celle déclarée, pour tenter d’annihiler les effets bénéfiques de cette première disposition : imaginons alors un acquéreur, ayant acquis un terrain sans condition de permis de construire, qui se trouverait dans l’impossibilité de réaliser son projet de construction, faute de pouvoir se prévaloir des effets de l’article L442-14 !!

En deuxième lieu, l’article R600-3 du C. Urb stipule :

« Aucune action en vue de l’annulation d’un permis de construire ou d’aménager ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable n’est recevable à l’expiration d’un délai de six mois à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement.

 

Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d’achèvement mentionnée à l’article R. 462-1. »

L’on voit bien l’intérêt, donc, de déposer une « DAACT division » dans le cas des déclarations préalables de division, même partiellement après chaque vente de lot, pour sécuriser chaque fois davantage, à la fois les divisions déjà effectuées, mais aussi la cristallisation de la règle d’urbanisme opposable lors de la délivrance de l’arrêté de non opposition !

Qu’en est-il en matière de permis d’aménager ?

Dans le cas du PA sans travaux, c’est-à-dire de la division d’une unité foncière en vue de bâtir, qui ne relève de cette procédure « que » par application du deuxième point de l’article R421-19a) du code de l’urbanisme, alors la durée de validité de 3 ans détermine le délai, non plus pour réaliser l’ensemble des ventes, mais en vue de la réalisation des travaux (R424-17 du C Urb)

Ainsi, on considèrera que l’absence de travaux revient à considérer que ceux-ci sont déjà réalisés au moment de la délivrance de l’arrêté : ceci change donc totalement l’appréhension de la question de la conformité : le dépôt de la « DAACT division » pourra se faire dès cet instant et aura pour conséquence juridique « l’éclatement » de l’unité foncière à la grande différence de la non opposition à déclaration préalable !

A l’égard de l’application de l’article L442-14, ne pas oublier de déposer la « DAACT division » en PA sans travaux, revêt un intérêt moindre dès lors que ceci empêchera le délai de cristallisation de 5 ans de commencer à courir… ce qui ne constitue pas un préjudice pour les futurs acquéreurs, ni donc pour le pétitionnaire !

En revanche, à l’égard de l’application du R600-3 du C Urb, le dépôt de la « DAACT division » dès l’octroi de l’autorisation d’urbanisme aura le mérite de rendre la décision définitive, indépendamment de l’observation des règles d’affichage issues de l’article R424-15 du C Urb.

A noter que le législateur n’a pas dû percevoir qu’en l’absence de travaux, les riverains qui auraient pu avoir un intérêt à agir contre la décision, et qui se trouveraient, le cas échéant, privés d’un affichage règlementaire de l’autorisation ainsi octroyée par négligence du lotisseur, pourraient, du même coup, se trouver dépourvus de toute chance de faire valoir leurs droits, s’ils venaient à découvrir le projet d’aménagement lors de l’affichage du permis de construire d’un premier acquéreur, et ce, très probablement plus de 6 mois après la date de l’arrêté de lotir !

Publié le 25 mai 2018, mis à jour le 5 mai 2020 par

Une crise immobilière s’ajoutera-t-elle à la crise sanitaire ?

Chers membres de notre atelier, chers étudiants, chers collègues, chers amis,

En espérant que vous allez tous bien, voici une analyse de la situation actuelle, agrémentée de quelques dessins de mon ami Christian TEEL, caricaturiste sportif (surtout cycliste) à qui j’avais demandé d’illustrer quelques articles en 2015, beaucoup restent actuels et permettent d’alléger la gravité de la situation.

Depuis deux semaines certains acteurs de l’industrie immobilière s’interrogent, pour ne pas dire s’inquiètent d’une crise immobilière annoncée, sans doute faut-il rappeler que la peur n’évite pas le danger et qu’il ne faut pas ignorer les étapes d’un processus long et finalement incertain, oui incertain. Dans le cas contraire nous précipiterons la crise, pour ne pas dire nous l’accentuerons !

En ce qui nous concerne, l’expert immobilier n’est pas un mouton de panurge et il est hors de question d’avancer des chiffres, toute supputation serait hasardeuse, pour ne pas dire irresponsable.

A l’instar de ce qui s’est passé en 2008, « une crise financière sans précédent depuis 1929 », disait-on à l’époque… où le fait générateur de la crise fut la fermeture de la banque Lehman Brothers le 15 septembre.

En 2020, on peut déjà dire que le fait générateur du changement de cycle sera la décision gouvernementale de confinement du 16 mars, il y aura un avant et un après, tout ce qui a été fait et écrit avant, y compris la valorisation des biens, n’a plus de certitude.

L’absence de certitude n’est pas en soi une crise, elle doit favoriser la capacité de résilience et l’émergence du bon sens.

Sans doute la financiarisation de certains actifs et le couplage immobilier/mobilier avait fait perdre la raison à certains investisseurs (et parfois à ceux qui les accompagnent) et ce depuis plusieurs années. Personnellement je me suis souvent inquiété d’une dérive financière de l’immobilier (cf la conclusion générale (page 554) de ma thèse soutenue en 2016, j’avais même rapproché la méthode DCF (une méthode d’évaluation) avec l’ECP (l’effet Placebo).

Mais l’heure n’est pas de savoir qui a raison ou tort, cela ne sert à rien.

Bien sur la bourse a subi une crise instantanée, n’en déplaise à certains le temps de la bourse n’est pas le temps de l’immobilier, fort heureusement.

La situation immobilière se compose comme une valse à quatre temps (oui je sais Mathilde, la valse c’est trois temps, mais Brel ne l’a-t-il pas comptée au moins jusqu’à mille ?) :

  • Celui que nous connaissions, un temps de réjouissance de l’immobilier avec des taux historiquement bas et un nombre de transactions historiquement haut, un âge d’or qui permettra aux plus jeunes de nous classer rapidement dans la catégorie des rabâcheurs ou des anciens combattants, n’en parlons plus.
  • Celui que nous connaissons, un temps d’expectative, avec des craintes et des réflexes de repli sur soi, souvent irrationnels. Il devrait durer jusqu’à la fin du confinement et les premiers jours de reprises effectives du travail. L’action balaiera instantanément ce temps, c’est ce que nous attendons, avec impatience.
  • Celui que nous allons connaitre, un temps d’illiquidité, la théorie du parebrise et du rétroviseur, les opérateurs regardent devant et les experts regardent derrière, au milieu il y a les bonimenteurs. Ce temps d’illiquidité peut durer de 12 à 24 mois, il va même forcément durer, ce n’est pas si grave si les banques jouent le jeu, notamment les reports massifs d’échéances.
  • Enfin celui que nous ne connaissons pas mais que nous redoutons tous, le temps du marché. La théorie du « je te tiens tu me tiens par la barbichette », le premier du vendeur ou de l’acquéreurqui rira aura le sentiment d’avoir gagné… mais gagné quoi au juste ? le même acheteur gagnant d’un jour sera perdant le lendemain lorsqu’il deviendra vendeur lui-même…

Les premiers contacts « post confinement » du marché Lillois ne semblent pas accablants, même s’ils ne peuvent être exhaustifs et surtout ils seront rapidement évolutifs, c’est d’actualité.

Ici, cet agent immobilier me fait part de ses 40 compromis en cours de signature notaire et de ses 2 défections (seulement)… sans doute n’avait il pas encore l’information d’une ordonnance de suspension des délais du droit de préemption (reporté à un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire).

Là, un appartement mis en vente par le système VNI (Vente Notariale Interactive), 103m2 à rénover bd St Denis Paris 10ème, évalué à 1 050 000€ (avant confinement), s’est vendu à 1 105 000€ il y a 48h (pendant confinement), alors même que le nombre de visite s’était forcément restreint.

Sans parler du foncier, denrée rare s’il en est, dont le prix SDP n’est pas là de s’affaiblir compte tenu du besoin de logements, Covid ou pas. D’ailleurs les PUV signées plusieurs mois avant le Covid se concrétiserons plusieurs années après.

Bien sûr, il y a les loyers des commerces : les demandes de report qui pleuvent et sans doute les demandes de baisse qui pleuvront, faut-il rappeler les excès des taux de rendement attendus, favorisant ainsi l’augmentation parfois irraisonnée de certains loyers… pas tous heureusement.

Bien sûr, cet important investissement « bureaux » (plus de 20M€), « dealé » avant le confinement, qui se trouve différé par une décision du comité d’engagement d’un investisseur institutionnel, suspendant l’ensemble de ses investissements, jusqu’à nouvel ordre.

Bien sûr, chacun de vous a déjà en tête telle ou telle situation précise qu’il connait…

Bien sûr quelques opportunités de marché offriront quelques bonnes affaires, cependant les opportunités ne font pas le marché, que ce soit dit.

A l’instant de la situation connue, il y a certes des raisons de s’inquiéter mais aussi d’espérer (la force de l’état, la capacité des banques, la stabilité politique et monétaire et l’Europe), plus que jamais la théorie du bilan coût/avantage a un sens. A l’instant, c’est le statu quo et il va durer. Mon danseur risque même de confondre ou de chevaucher les temps et se prendre les pieds dans le tapis, cela permettra d’éviter peut-être la panique.

L’immobilier est une valeur refuge, certains l’ont même imaginé comme un coffre-fort, n’allons pas jusque-là. Le principe même d’une valeur refuge est sa capacité de résilience, ne serait ce que par son inertie, elle nous protège des décisions à l’emporte-pièce, celles qui allumeraient la mèche d’une spirale baissière.

Le cycle de l’investissement immobilier est un temps long. Il est donc tout à fait prématuré de paniquer et de se précipiter, sauf à se tirer une balle dans le pied… et à ne plus danser du tout. Ceux qui raccourcissent le temps de l’immobilier, par nécessité d’amélioration du TRI, ont tort. Sachez qu’une valse à quatre temps c’est beaucoup moins dansant mais tout aussi charmant qu’une valse à trois temps, c’est Brel qui le dit !

N’hésitez pas à consulter les experts, ils sont nombreux au sein de notre atelier, quel que soit leurs statuts ou leurs normes !

Ce matin, en consultant mes mails, je lisais cette proposition de la société AGORA France « La bourse au quotidien, analyses et conseils boursiers indépendants » qui proposait en publicité « Recevez un rapport spécial complet : Comment devenir riche en temps de crise ».

Je vous le concède, au regard de la crise que nous connaissons, une telle publicité semble inappropriée, pour ne pas dire nauséabonde. La consultation du site WEB de cette société confirme deux caractéristiques de la financiarisation, l’avidité et le cynisme, souvenons-nous en. Néanmoins cette caricature outrancière révèle également qu’une crise n’est jamais sans lendemain.

Les spéculateurs sans scrupule se frottent, peut-être, déjà les mains de la crise qui s’annonce. Est-ce la peine, plus tôt que de raison, de leur faire offrande du marché immobilier ?

Chers membres, je vous remercie de votre attention, j’espère avoir aborder ce sujet avec une certaine légèreté, l’essentiel est pour l’instant ailleurs, notamment du côté des soignants. Je vous encourage à la solidarité, à la prudence et à la confraternité, merci également de vous échanger les informations (c’est le nerf de la guerre !) qui permettent d’alimenter une réflexion objective au sein de notre atelier !

Si besoin, pour celles qui en doutent, je ne sais pas danser, du tout. Je n’ai d’ailleurs pas l’intention d’apprendre.

D’ores et déjà, nous faisons le pari d’une formation le 23 juin, sur le sujet du PLUI2 de la MEL, histoire de conjurer le sort et d’une forte envie de se revoir en pleine forme, merci à Marie pour son énergie et à Paul Guillaume BALAY pour cette suggestion.

Enfin, je ne résiste pas de conclure mes propos par cette devise qui m’est chère…

En avant, malgré tout ! (Devise du 150ème  régiment d’infanterie de VERDUN, auquel je dois tant lorsque j’ai eu 18 ans, hier-      )

Jean-Jacques MARTEL, docteur en droit,

Expert immobilier agréé par la Cour de cassation

Maître de conférences à l’Université de Lille (MCA) Co-directeur du MASTER 2 ICEU et du DU baux commerciaux, directeur pédagogique de l’ICH

Président de l’Atelier des Professionnels de l’immobilier et de l’ICEU ICH associé de l’Université de Lille 2.

Vous cédez votre bien immobilier à un professionnel de l’immobilier : préférez toujours la promesse unilatérale de vente ou le compromis de vente avec terme extinctif !

promesse

Votre Notaire vous a trouvé le promoteur ou l’aménageur idéal pour se porter acquéreur de votre bien immobilier. Plus l’offre de prix vous paraît alléchante, plus il convient de se méfier du candidat à l’accession. En effet, les professionnels les moins scrupuleux auront tendance à proposer des prix manifestement surévalués, afin de signer rapidement des promesses de vente synallagmatiques avec un grand nombre de propriétaires. Ce sont souvent les mêmes qui chercheront à faire travailler des prestataires (Architectes, Géomètres-Experts, Paysagistes, ..) gratuitement, en échange d’une simple promesse de contractualiser avec eux si le projet peut se concrétiser. Pour mettre toutes les chances de leur côté, ils exigeront au compromis, légitimement, une clause suspensive d’obtention d’une autorisation d’urbanisme leur permettant de vérifier la faisabilité du projet qu’ils auront conçu sur l’emprise foncière à acquérir. Ils demanderont un délai suffisant pour déposer leur demande d’occuper le sol, et seront assez enclins à demander au Notaire de ne pas fixer de date limite pour l’obtention du permis de construire ou d’aménager. De cette façon, nombre de compromis sont signés avec une date limite pour la régularisation de l’acte, mais sans que cette date ne fasse « tomber » le contrat. En effet, il est très courant que les clauses du compromis ne confèrent au propriétaire que la faculté de « mettre en demeure » le co-signataire de la promesse de signer l’acte de vente. Mais que faire si l’aménageur/promoteur refuse de se soumettre à cette obligation contractuelle ?

Sachez que seul une action devant le Juge civil permettra de mettre un terme à l’avant-contrat, ce qui signifie que vous vous trouvez dans l’impossibilité même de signer un nouvel avant-contrat avec un autre candidat acquéreur !

Notre conseil est donc de refuser de signer une promesse de vente sans qu’un terme extinctif ne soit effectivement fixé, de sorte qu’il sera de votre ressort, mais de votre seul ressort, de concéder un délai supplémentaire à votre acquéreur, si celui-ci vous explique qu’il ne reste que quelques semaines à attendre pour finaliser la vente !

En résumé, mieux vaut signer une promesse de vente avec un délai long (18 à 24 mois) avec un terme extinctif, qu’une promesse de vente avec un délai court (12 mois) avec un terme non extinctif. Ceci est d’autant plus vrai qu’il y a de fortes chances pour que le prix fixé, dans le premier cas, soit aussi celui de l’acte final, alors qu’à l’inverse, dans le deuxième cas, le but non avoué du promoteur, est de régulariser l’acte avec une réduction de prix souvent très substantielle !

A noter enfin, comme nous l’avions exposé précédemment ici, que l’article L290-2 du code de la construction et de l’habitat contraint le promoteur ou l’aménageur qui souhaite signer un compromis sur base d’un délai qui dépasse 18 mois, de verser au minimum 5% d’indemnités d’immobilisation au vendeur, sous peine de nullité de l’acte qui devra revêtir une forme authentique (L290-1 du CCH).

Un promoteur/lotisseur peut-il m’empêcher d’aménager mon terrain en extension de son opération ?

Lorsqu’une zone à aménager d’un PLU englobe plusieurs propriétés, l’aménageur qui aura initié une première tranche du projet sur l’une ou plusieurs d’entre elles, sera souvent tenté de prendre en otage les autres propriétaires, surtout s’ils ont refusé de céder leur part de terrain au prix que ce dernier aurait jugé acceptable !

Qu’en est-il donc de ces pratiques qui consistent, pour l’aménageur, à conserver, par devers lui, une bande de terrain, dans le but de provoquer artificiellement l’enclavement des autres propriétés aménageables ?

Nous verrons que, dans la plupart des cas, il s’agit juridiquement d’une solution inefficace. Puis, nous étudierons dans quelle mesure, parce que les propriétaires voisins auront été mis en situation  de co-construire le projet urbain, il peut être envisagé que l’aménageur soit dédommagé d’une part des investissements réalisés, pour avoir eu le mérite de prendre le risque des études et travaux sur une opération d’ensemble.

Examinons donc tout d’abord, le cas où l’aménageur a réalisé une première tranche de travaux en conservant une bande d’un mètre de large de terrain en bout de voirie.

L’erreur la plus souvent commise par l’aménageur est de ne pas prendre le soin d’exclure de son périmètre loti l’emprise de terrain qu’il souhaite conserver ! En effet, sans cette précaution, ladite emprise fait partie du projet urbain. Non seulement, son aménagement doit être décrit dans le programme des travaux, mais plus encore, son assiette fait partie des espaces communs qui sont à rétrocéder, soit à la commune, soit à l’association syndicale, si c’est le choix retenu. Dès lors, l’une ou l’autre ont un droit de regard sur le devenir de cet espace, y compris sur sa valorisation, sauf précaution apportée à ce sujet dans le cahier des charges…

En réalité, même avec cette précaution, il sera difficile à l’aménageur d’empêcher le désenclavement des terrains voisins.

  1. D’abord, les orientations d’aménagement de la zone imposent sûrement un schéma de desserte par des voies de circulation, de sorte que la puissance publique rendra nécessaire l’entente entre les parties : à défaut, la collectivité pourra toujours instituer un emplacement réservé « création de voie » sur les emprises privées qui viendraient contrevenir à l’intérêt général.
  2. L’aménageur aurait tort de sous-estimer les effets de l’article 682 du code civil qui veut qu’un propriétaire qui serait privé d’un accès à la voie publique puisse être désenclavé afin de pouvoir jouir pleinement des possibilités d’exploitation de son bien, moyennant une « indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner ».

L’on constate donc que les chances pour un aménageur de tirer un fruit de son investissement à l’égard de propriétaires riverains sont assez réduites !

Pour autant, nous estimons qu’elles ne sont pas toujours nulles !

En effet, si l’on imagine qu’un aménageur proposait à un propriétaire riverain de partager le coût de mise en viabilité d’une voie qu’il installerait « à cheval » entre leurs propriétés respectives pour respecter le principe de desserte des OAP (orientations d’aménagement et de programmation), mais que ce dernier refusait explicitement cette proposition, obligeant l’aménageur à créer la voie exclusivement et à ses seuls frais sur sa propriété, l’on pourrait objectivement en déduire que le propriétaire voisin s’est lui-même enclavé !

Nous ignorons si le Juge de l’ordre judiciaire lui refuserait le désenclavement par la voie nouvelle ainsi réalisée, mais il est probable qu’il lui infligerait de devoir supporter le remboursement du coût d’une partie des ouvrages, à titre d’indemnité « proportionnée au dommage occasionné », si celui-ci venait à faire jouer, avec la plus grande mauvaise foi, l’article 682 du code civil.

Nous laissons aux Avocats et juristes spécialisés le soin de commenter notre analyse.

 

 

 

L’opérateur de téléphonie Orange peut-il refuser de raccorder votre habitation individuelle ?

Dans un contexte où la mort de la téléphonie fixe est déjà annoncée, la question se pose de savoir si l’opérateur devenu « Orange » est encore redevable d’un service public de desserte de tous ses abonnés potentiels comme pouvait l’être l’opérateur historique France Télécom !

A l’heure où l’on peut recevoir les chaînes de TV par satellite, et téléphoner exclusivement via un téléphone mobile, l’on pourrait penser que la téléphonie fixe est devenu un réseau de « confort » qui, à l’instar du gaz ou de la fibre optique, n’est installé par l’opérateur qu’en fonction de son bon vouloir, et s’agissant d’entreprises privées, en fonction de son seul critère décisionnel : la rentabilité économique !

En fait, le service universel des communications électroniques assurait, à l’origine, un accès à tous les citoyens à trois composantes : le service téléphonique, l’annuaire d’abonnés et de service de renseignement, et la publiphonie, c’est-à-dire l’accès à des cabines téléphoniques publiques.

En 2015, la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a réorienté le cadre du service universel sur l’accès au service téléphonique avec un débit suffisant pour permettre l’accès à Internet. La publication de l’annuaire d’abonnés est apparue désuète car ce service est naturellement offert par le marché, notamment dans sa forme électronique. La publiphonie a été supprimée du dispositif.

Ainsi, il subsiste donc un service public qui donne droit à l’accès au réseau Orange, désigné comme prestataire pour le service universel. Concrètement, cela signifie que toute personne peut demander l’installation d’une ligne téléphonique et a le droit de se raccorder au réseau Orange. Le tarif appliqué par le prestataire est le même pour tout le monde, quelle que soit la difficulté de l’installation de la ligne et du raccordement. Il peut éventuellement être différent lorsqu’il s’agit d’une ligne secondaire.

En particulier, voici comment se répartissent les frais de raccordement au réseau de communication. Il faut distinguer les travaux dits de « génie civil » qui permettent de construire le réseau (la pose des gaines pour le passage des câbles), des travaux de « câblage » qui permettent le raccordement physique de l’abonné.

Les travaux de génie civil situés sur la propriété privée et sur la voie publique située dans son prolongement, sont à la charge du propriétaire. Il est libre de les confier à un prestataire distinct du prestataire de service universel, mais il devra les faire aboutir au « point d’adduction » qui est défini par l’opérateur.

Les travaux de génie civil situés sur la voie publique éventuellement nécessaires au raccordement de la maison sont à la charge de l’opérateur en charge du service téléphonique. Toutefois, en cas de difficultés exceptionnelles de construction, une participation peut être facturée par l’opérateur au demandeur pour une résidence secondaire.

De la même façon, les prestations de câblage sont à charge de l’opérateur, sauf en cas de résidence secondaire.