Comment gagner 7 mois de délai sur une vente de terrain à bâtir grâce à la division primaire !

Depuis le 1er avril 2017, bon nombre de divisions en vue de bâtir se voient imposer le dépôt d’un permis d’aménager en lieu et place de la simple déclaration préalable de division pour le simple fait qu’ils se trouvent en secteur « protégé », l’article R421-19 précise : « dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques, dans un site classé ou en instance de classement« .

En effet, les sites patrimoniaux remarquables définis au L631-1 du code du patrimoine ont le caractère de servitude d’utilité publique et peuvent couvrir un large territoire puisqu’ils ont « digéré » à la fois les anciennes AVAP et ZPPAUP, mais aussi les secteurs sauvegardés.

Il n’est donc pas inutile de se poser la question de savoir si la division en vue de bâtir envisagée par le client est susceptible d’échapper à la règlementation des lotissements.

Ainsi, si le projet de construction consiste en autre chose qu’une maison d’habitation individuelle, le recours au dispositif particulier de la division primaire peut constituer une solution idéale pour gagner du temps et de l’argent !

Certes, c’était déjà le cas lorsqu’on évitait la déclaration préalable de division, car l’on économisait une procédure administrative d’un mois d’instruction, et le délai de retrait de 3 mois. Mais, dans le cas du permis d’aménager, le délai minimum d’instruction est de 4 mois (3 mois de permis d’aménager de droit commun + un mois de délai complémentaire « Architecte des Bâtiments de France »).

Le gain de délai total (pour aboutir à un permis d’aménager définitif) est donc potentiellement de 7 mois minimum sur ce type de dossier ! Si l’on considère aussi le coût du dépôt d’un permis d’aménager, même en un seul lot, le recours à la division primaire est, sans doute, le conseil le plus avisé que l’on puisse vous donner, en tant que professionnel de la division foncière ! … encore faut-il savoir mettre en oeuvre le dispositif !

 

Revendiquer l’utilisation d’un ancien chemin d’exploitation – est-ce possible ?

Un client nous questionne sur la possibilité de revendiquer l’utilisation d’un ancien chemin d’exploitation pour permettre son désenclavement dans les conditions de l’article 682 du code civil.

Pour rappel, l’article 682 prévoit que le désenclavement de la propriété, en cas d’accès insuffisant, vaut, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement.

Dès lors, il se peut qu’il existe déjà un accès à la propriété en dehors de l’usage de l’ancien chemin d’exploitation, mais que ce chemin puisse constituer une « aubaine » pour exploiter des droits à bâtir, non encore utilisés !

En matière de servitude légale, c’est-à-dire résultant de l’application de l’article 682 du code civil, l’assiette d’un passage ne peut plus être revendiquée après trente ans de non usage.

En revanche, le droit de passage découlant de la servitude légale ne s’éteint pas par le non-usage (Cass 3ème civile 11 février 1975).

Quel parallèle peut-on faire en matière de chemin d’exploitation ?

Si, pour des besoins de désenclavement d’une propriété privée, il peut être retrouvé la trace d’un ancien chemin d’exploitation qui permette le désenclavement, il est clair que l’une des solutions pour la mise en oeuvre de l’article 682 du code civil, et, en particulier, pour répondre aux exigences de l’article 683 (trajet le plus court et le moins dommageable), sera la réouverture du chemin d’exploitation au profit du fonds enclavé !

C’est ce qui fût jugé ici, indépendamment même des dispositions de l’article 682 : Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 2 novembre 2005, 04-17.297

« la cour d’appel a pu retenir que (…) le non-usage trentenaire allégué était sans incidence sur le droit des riverains d’emprunter le chemin d’exploitation, ce droit n’étant pas susceptible de s’éteindre par le non-usage ; « 

Quid, alors de l’indemnisation des fonds servants, posée par l’article 682 ?

De notre point de vue, si le chemin d’exploitation n’a pas perdu son statut par le non usage, l’on pourrait considérer que l’indemnisation n’a pas lieu d’être !

Il se trouve que c’est ainsi qu’a déjà été tranchée la question de façon indirecte : Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 4 février 1998, 96-12.554, Publié au bulletin

« Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de constater l’existence d’un chemin d’exploitation traversant notamment les parcelles lui appartenant et de dire que M. Y… bénéficiait d’un droit de passage en sa qualité de propriétaire riverain sur ce chemin, alors, selon le moyen, que si le droit de copropriété sur un chemin d’exploitation ne s’éteint pas par le seul fait du non-usage trentenaire, nulle disposition légale n’interdit à l’un des copropriétaires d’usucaper, de façon exclusive, l’assiette du chemin par une possession de trente ans ; qu’il résulte des constatations de la cour d’appel que l’assiette du chemin litigieux n’existait plus depuis 1942 et que M. Y…, demandeur au rétablissement du passage, résultant de l’existence antérieure d’un chemin d’exploitation, n’avait ni par lui-même, ni par ses auteurs, utilisé ledit chemin depuis plus de trente ans ; qu’en se bornant, dès lors, à retenir que le non-usage dudit chemin par M. Y… ou ses auteurs n’entraînait pas l’extinction du droit de passage, sans rechercher si M. X… n’avait pas précisément prescrit par une possession trentenaire l’assiette du passage, ainsi que l’avait d’ailleurs relevé le tribunal de grande instance, la cour d’appel ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 162-1 du Code rural, ensemble au regard des articles 544, 712, 2219 et 2262 du Code civil ;

Mais attendu qu’ayant constaté que l’assiette du chemin d’exploitation n’existait plus, depuis au moins 1942, dans sa partie dont M. X…, propriétaire de la parcelle 524, et M. Y…, propriétaire de la parcelle 523, sont riverains, la cour d’appel, qui a retenu à bon droit qu’un chemin d’exploitation ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires et qu’un propriétaire riverain ne peut perdre par non-usage trentenaire le droit d’utiliser l’ensemble du chemin, a, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, légalement justifié sa décision ; »

Cette solution retenue par la Cour de Cassation amène deux autres enseignements : le chemin d’exploitation ne peut être usucapé par l’un des copropriétaires, tant que celui-ci survit, et il survit, dès lors que les copropriétaires n’ont pas tous consenti à le voir disparaître.

Ainsi, si, grâce à l’existence du chemin d’exploitation, il n’y a pas d’enclave, il n’y a pas non plus d’indemnisation des copropriétaires pour l’utiliser à nouveau, si tous les copropriétaires du chemin n’ont pas renoncé à son existence !

Article publié le 24 juillet 2018 par

 

 

Votre voisin néglige votre demande de bornage amiable – faut-il aller directement au bornage judiciaire ?

Dans cette affaire, la cliente faisait valoir que son voisin avait engagé des travaux qui semblaient empiéter sur sa propriété. Devant la condescendance de celui-ci, elle avait saisi son Avocat qui l’orientait sur du bornage judiciaire.

Voici la réponse que je lui avais faite :

« Madame,

Votre démarche me semble être de bonne foi, et voici comment j’analyse cette question, indépendamment de mes deux « casquettes » (Géomètre-Expert et Expert de Justice).

Le coût du bornage judiciaire est généralement provisionné par le Juge à 2000 €, certes !

Pour autant, par expérience, je constate que les opérations se soldent souvent avec des montants d’honoraires situés entre 3000 et 4000 € HT !

Le bornage est généralement partagé entre les deux parties, par application pure et simple de l’article 646 du code civil.

Malheureusement, ce coût ne comprend pas les émoluments des Avocats des parties, et rien ne permet d’imaginer que le Juge condamnerait la partie défenderesse à régler les frais de Justice à la partie la plus diligente, en motivant sa décision par la négligence coupable de la partie adverse.

Pour l’instant, je ne crois pas que les Juges d’Instance reprochent au requérants de n’avoir pas cherché à passer préalablement par la voie amiable.

Pour autant, il me semble déterminant, en prévision d’un recours au bornage judiciaire, de solliciter auprès d’eux un bornage à frais partagés, de façon à préparer le dossier judiciaire, en démontrant leur probable mauvaise foi.

Je m’explique :

Le prix d’un bornage varie en fonction de divers paramètres (relations de voisinage, disponibilité des parties sur place, nombre de signatures à recueillir, bonne foi et participation active des parties, …)

Imaginons que votre bornage amiable soit devisé à 2000 € HT, compte-tenu du fait que, les relations étant difficiles, la procédure que constitue le bornage pourrait être assimilée à un acte de disposition, alors qu’il a encore été jugé tout récemment que celui-ci relève normalement de l’acte d’administration (Arrêt du 12 Avril 2018  – Cassation 3ème Ch civ – n°16-24.556 publié au recueil Lebon).

Il est évident que si les voisins acceptent de « coopérer » aux opérations de bornage, le prix pourra être revu à la baisse, même dans le cas de l’acte de disposition (risque d’écart entre la proposition de limite du voisin, et celle soumise par le Géomètre-Expert) !

Dès lors, si l’on propose trois solutions au voisin, et qu’il les refuse toutes, le remboursement des frais d’Avocat et d’expertise, en cas de bornage judiciaire devrait pouvoir être obtenu auprès du Juge, me semble-t-il !

Voici quelles pourraient être ces trois solutions :

  1. L’article 646 du code civil prévoit le bornage à frais partagés, soit 1000 € HT par partie. Votre voisin aurait tout loisir de dire qu’il n’a pas budgété cette somme pour l’instant, et qu’il refuse parce qu’il considère que le fait de ne pas connaître ses limites de propriété ne constitue en rien une difficulté pour lui. Cette position est déjà difficile à entendre pour un Juge d’Instance, saisi à postériori, puisque, dans votre cas, c’est bien votre voisin qui a engagé des travaux ! C’est donc bien lui qui provoque la nécessité du bornage !
  2. A défaut d’accepter cette solution, il pourrait, à minima, contribuer à limiter le coût du bornage, en concédant une participation active à la démarche, et en acceptant d’en payer une partie, même symbolique.
  3. S’il n’accepte pas cette deuxième solution, il existerait une dernière solution avant d’ester en instance devant le Juge Judiciaire, qui consisterait à lui demander s’il est prêt à participer de bonne foi au bornage (aide au recueil des signatures sur un mandat de bornage, aide à la fixation d’une date de convocation, …etc), sans y participer financièrement.

Il est évident que dans le cas d’un refus, y compris de la dernière solution, vous vous trouvez alors dans une situation idéale pour demander au Juge que le bornage ne vous coûte rien de plus que – et au grand maximum – le montant du devis de bornage amiable dans le cas où vous l’auriez pris entièrement à votre charge (soit 2000 €) !

Mais mieux encore, si le PV de carence rédigé établit une limite, comme probablement celle qui devrait résulter d’une expertise judiciaire, et que le Jugement de bornage judiciaire, finalement prononcé, vient confirmer cette limite, l’on peut imaginer que le Juge sera tenté de condamner la partie récalcitrante aux dépends de la procédure, dans son intégralité !

Je vous propose de faire suivre cette analyse à votre Avocat pour recueillir son avis »

Le conseil de l’avocat fût alors de suivre notre proposition, de manière à se trouver, en cas de démarche judiciaire, dans une bien meilleure position pour limiter les frais engendrés par l’indélicatesse du voisin.

Rédigé le 29 mai 2018 par 

Division de terrain à bâtir – quelles garanties exiger de son Géomètre-Expert ?

Comme nous l’avons vu dans notre article « Est-il toujours possible de construire sur un terrain « réputé » constructible ? », la seule considération qu’un terrain se trouve situé dans une zone constructible d’un document d’urbanisme approuvé ne suffit pas à garantir la faisabilité de division en terrains à bâtir.

Mais, au-delà même des éléments de vérifications mentionnés dans cet article, la question se pose du document d’urbanisme applicable !

En effet, celui-ci peut :

  • être en cours d’élaboration ou de révision. Nous vous renvoyons alors sur la question du risque de sursis à statuer, traitée ici.

  • avoir été annulé, ou avoir été déclaré illégal ! Les conséquences sont les mêmes – retour au document d’urbanisme antérieur – mais l’information est beaucoup plus difficile d’accès dans le second cas ! Encore faut-il pouvoir avoir accès au contenu du document antérieur !

  • ou simplement, être encore inexistant. Dans ce cas, l’on devra se référer aux « parties actuellement urbanisées » de la commune, dont la cartographie est très difficile, voire impossible d’accès pour le particulier, et souvent tout aussi compliquée à appréhender pour le professionnel !

Or, le constat est fait que les praticiens de ce droit complexe – l’urbanisme – que sont les Géomètres-Experts, ne mentionnent que très rarement, dans leur devis, la nécessité de mener ces analyses, et le temps prévu pour y procéder.

Le risque que cela constitue, est celui d’engendrer au client propriétaire, des frais importants de relevés topographiques, de démarches de bornage, de mise au point de plans-projet de division, de modificatif du parcellaire cadastral, et de dépôts de demandes d’urbanisme qui se soldent finalement par un échec, et parfois, une impossibilité d’aboutir, même en rectifiant les erreurs commises. Ces frais atteignent souvent entre 1000 et 2000 € HT.

Se retranchant derrière son obligation de moyen et non de résultat, le Géomètre-Expert n’étant pas parvenu à faire aboutir un projet de division, sera parfois tenté de minimiser ce qui constitue pourtant un manquement à son devoir de conseil ! En effet, qu’un client envisage de réaliser un projet qui se révèlera impossible ne lui est, certes, pas imputable. En revanche, le Professionnel se doit d’alerter son client sur toutes les vérifications qu’il compte opérer pour valider son projet de division, avant de l’engager dans des démarches non maîtrisées.

Dès lors, nous ne saurions que conseiller aux propriétaires vendeurs d’interroger leur prestataire sur le montant d’honoraires qui sera dû, dans le cas d’un échec de la procédure administrative de division, préalable à la vente. Il semblerait logique que l’acompte à verser pour le démarrage de la mission, n’excède pas le montant destiné à valider la faisabilité du projet.

ParaIlèlement, il nous semble également opportun d’exiger de faire fixer contractuellement le délai de livraison des documents nécessaires pour la vente, c’est-à-dire à la fois le temps nécessaire pour constituer les pièces, mais également le délai d’instruction de la demande, ainsi que le délai de purge des recours et retraits administratifs.

Se satisfaire d’une date rapide d’intervention sur le terrain, n’est en rien une garantie de livraison des pièces exigibles pour la vente, dans des délais raisonnables.

De notre côté, dans certains cas complexes pour lesquels il est difficile de présager de la réponse administrative, nous proposons des missions dans lesquelles nous partageons financièrement avec le client, le risque d’échec de la procédure d’urbanisme.

Ainsi, couvrir le risque juridique de la procédure d’urbanisme prend une part de plus en plus importante de nos activités.

Publié le 15 mai 2018 par

Transférer du CES pour augmenter l’emprise au sol d’un terrain à bâtir – est-ce possible ?

Depuis que la Loi ALUR du 24 mars 2014 a mis fin aux COS et aux superficies minimales dans les PLU et PLU intercommunaux, la densité urbaine est gérée exclusivement par le coefficient d’emprise au sol et les hauteurs de construction, généralement fixés respectivement aux articles 9 et 10 des règlements d’urbanisme.

L’emprise au sol est définie à l’article R420-1 du code de l’urbanisme :

« L’emprise au sol au sens du présent livre est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus.
Toutefois, les ornements tels que les éléments de modénature et les marquises sont exclus, ainsi que les débords de toiture lorsqu’ils ne sont pas soutenus par des poteaux ou des encorbellements. »
Ainsi le coefficient d’emprise au sol constitue le rapport entre la somme des emprises au sol couvertes par les constructions et bâtiments d’un terrain, et la superficie du terrain pris pour référence.

En urbanisme, la notion de « transfert » de densité, propre à la gestion du COS, parfois mentionné à l’article 14 des anciens POS, mais encadré par l’article L123-4 et dont l’objectif était de basculer du COS d’une zone émettrice vers une zone réceptrice, n’existe plus depuis le 23 septembre 2015.

Pour rappel, cette disposition s’accompagnait d’une servitude administrative à constater dans un acte authentique, qui grevait alors le terrain « émetteur » de densité :

« […] En cas de transfert, la totalité du terrain dont les possibilités de construction sont transférées est frappée de plein droit d’une servitude administrative d’interdiction de construire constatée par un acte authentique publié au fichier immobilier. Cette servitude ne peut être levée que par décret pris sur avis conforme du Conseil d’Etat. »

Le législateur n’a pas prévu de dispositif similaire pour envisager le « transfert » d’emprise au sol.

Pour autant, de la même façon que se posait la question de la répartition de SHON (devenue surface de plancher) à l’intérieur d’un périmètre loti en vertu d’un COS (coefficient d’occupation du sol) applicable à une zone donnée, l’on peut se poser la question de la répartition de l’emprise au sol à l’intérieur d’une opération de lotissement.

En particulier, si le règlement du plan local d’urbanisme ne s’oppose pas explicitement à l’application du R151-21 (mieux connu sous l’ancien numéro  R123-10-1), qui dispose :

« […]

Dans le cas d’un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d’assiette doit faire l’objet d’une division en propriété ou en jouissance, l’ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d’urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s’y oppose. »

alors, l’on pourra parfaitement imaginer une répartition de l’emprise au sol au travers des différents lots, bien que le législateur n’ait pas pris la peine de le prévoir explicitement dans les pièces de la déclaration préalable de division, ou dans celles du permis d’aménager.

Dès lors, le lotisseur devra garantir à l’administration une emprise au sol maximale affectée aux lots issus de son opération de lotissement pour en assurer la conformité, mais il pourra limiter contractuellement celle d’un lot au bénéfice d’un autre.

A noter qu’en l’espèce, les limitations au droit de construire n’auront pas eu à faire l’objet d’une servitude administrative constatée par acte authentique, puisque non encadrées par le législateur.

Publié le 4 mai 2018 par